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mercredi 18 décembre 2019

Quelle est la différence entre répartition et capitalisation ? (épisode 1)



La répartition et la capitalisation sont deux moyens de financer la retraite. Dans ce billet, on présente la différence essentielle entre ces deux modes de financement, sans épuiser le sujet.

1. La répartition : les cotisants d'aujourd'hui financent les pensions des retraités d'aujourd'hui

Dans un système de retraite financé en répartition, les cotisations payées par les gens qui travaillent à un moment donné servent à payer les pensions des gens qui sont retraités au même moment. La capacité d'un système de retraite en répartition à assurer un bon niveau de pension aux retraités dépend de manière cruciale du nombre de travailleurs effectivement employés et de leur productivité. Si le taux d'emploi augmente, cela fait plus de cotisants et si la productivité des travailleurs augmente, cela se traduit généralement par des rémunérations plus élevées, et donc une assiette de cotisations plus importante. 


Le graphique ci-dessous illustre le mécanisme. On considère une année de référence, pour laquelle le montant des cotisations collectées est égal à 100. Dans un système en répartition, ces 100 de cotisations sont versées aux retraités sous forme d'un montant de 100 de pensions. Imaginons que l'année suivante, et l'exemple est purement fictif (c'est juste pour qu'on voie quelque chose sur le graphique), le nombre de travailleurs augmente et génère un supplément de cotisations de 15 et que chaque travailleur devient plus productif, et donc mieux rémunéré, de sorte que cette productivité accrue génère un supplément de cotisations de 6. Au total, par rapport à l'année initiale, le montant de cotisations sera de 100+15+6=121 l'année suivante, 121 qui seront versées aux retraités. Imaginons qu'à la troisième année, le taux d'emploi se rétracte entraînant une baisse de cotisations de 16 et que les salariés sont moins productifs, ce qui conduit à une baisse des rémunérations, et donc des cotisations, pour un montant de 7. Cette troisième année, la masse de cotisations baissera à 121-16-7 = 98. Le système ne pourra redistribuer que 98 de pensions aux retraités.

On comprend donc que la capacité d'un système par répartition à verser des pensions suffisantes aux retraités dépend de l'évolution du nombre de cotisants et de la productivité du travail. Les deux variables jouent le même rôle comme les deux pistons d'un même moteur : le "rendement" de la répartition augmente si le taux d'emploi s'accroît ou si la productivité du travail s'accroît.

On comprend aussi que la répartition, qui repose sur un contrat entre générations successives (j'accepte de payer mes cotisations aujourd'hui parce que j'ai confiance que les générations futures paieront leurs cotisations pour financer ma retraite) doit s'appuyer sur des institutions en mesure de garantir ce contrat. De ce point de vue, l’État est l'institution la plus robuste, par sa capacité à lever des contributions obligatoires.

On comprend enfin que la répartition est par construction inéquitable : les premières générations de retraités bénéficient d'une pension sans jamais avoir cotisé. Tous les déséquilibres ultérieurs éventuels d'un mécanisme en répartition ne sont, en définitive, que la conséquence de ce "repas gratuit" dont sont bénéficiaires les premières générations de retraités.

2. La capitalisation : les cotisations d'aujourd'hui financent les pensions des retraités de demain

Dans un système financé en capitalisation, les cotisations sont versées dans des comptes individuels ou collectifs, gérés par des organismes dédiés, appelés fonds de pension dans les pays anglo-saxons. Ces fonds de pension placent les cotisations sur les marchés financiers et c'est le rendement obtenu sur ces marchés financiers (net des frais de gestion et d'investissement), capitalisé année après année jusqu'à la retraite, qui déterminera le montant de la pension que le salarié pourra récupérer lorsqu'il partira à la retraite. À la différence de la répartition qui opère un transfert instantané de revenus entre les travailleurs et les retraités dans une année donnée, la capitalisation opère un transfert de revenu dans le temps entre les travailleurs d'une année donnée et ces mêmes travailleurs lorsqu'ils prendront leur retraite. 

La capacité d'un système en capitalisation à verser des pensions suffisantes aux retraités dépend de l'évolution des rendements sur les marchés financiers, notamment du rendement des actions (qui représentent des parts du capital des entreprises) appelé également rendement du capital.

Il pourrait être tentant de choisir un mode de financement des retraites, par répartition ou par capitalisation, en ne prenant en considération que leur rendement comparé : croissance de la population active et croissance de la productivité pour la répartition, et rendement du capital pour la capitalisation. Ce serait oublier que la répartition, comme la capitalisation, sont soumises à des risques et que le rendement de l'opération retraite reste incertain. Nous aurons l'occasion d'y revenir dans un billet ultérieur.

d_phi retraites #2

1 commentaire:

  1. Bonjour,
    Un système de retraite par capitalisation permet aussi de faire financer la retraite par des salariés d’un autre pays. Ces dernières années, l’actualité économique a fait état de fonds de pension américains investissant dans telle ou telle entreprise française avec des exigences de rentabilité dans le but de financer les pensions de leurs retraités.
    Si les fonds de la capitalisation sont investis dans le même pays que les salariés et retraités, les pensions versées au titre de la capitalisation sont comme pour la répartition prélevées sur la richesse produite à l’instant T dans le pays. Dans les deux options si il y a crise économique, il y a des difficultés à verser des pensions.

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